Gekikara était assise devant l'Académie, dans les escaliers. Elle regardait le paysage d'un oeil désintéressée, jouant avec une mèche de ses cheveux. Soudain, elle vit une silhouette, un bras, puis un parapluie se déposa délicatement sur ses genoux. Elle esquissa un sourire illuminé. Elle l'effleura, caressant le plastique du bout des doigts. La matière semblait l'absorber, son regard était uniquement consacré à celui-ci... Ce serait tellement bien si il y avait du sang dessus, le rouge lui allait si bien... Sa respiration s'accéléra, tandis qu'elle pinçait doucement le plastique, continuant à le caresser de son autre main comme si c'était un chien. Elle était sur le point de l'empoigner, quand une main se posa sur son épaule, la faisant sursauter. C'était un garçon, un peu moins jeune qu'elle, il portait un long manteau ouvert. Ses cheveux étaient hirsutes et son physique était tout ce qu'il y a de plus banal. Mais son regard rouge, meurtrier, le distinguait de tous les autres. Le sourire de Gekikara s'évanouit.
« Tiens, c'est cadeau.
- Kuroha... fit-elle, Tu sais bien que je n'ai pas le droit de le toucher.
- Si tu en as envie, pourquoi te priver? »
Elle ne répondit pas, et poussa le parapluie vers les escaliers, le laissant dégringoler. Kuroha la dévisagea sans rien dire. Il s'assit alors à côté d'elle. Un long silence s'ensuit, sans que l'un ni l'autre ne bouge. Le jeune homme tourna la tête vers elle, qui fuyait toujours son regard. Elle le regarda à son tour, droit dans les yeux.
« Non, ce n'en est pas une.
- Est-ce que si c'en avait été une tu m'aurais menti? Ou tu n'en aurais pas tenu compte?
- Je t'aurais menti. répondit-elle
- Difficile de te croire alors, dit-il, d'un rire sans joie, Je ne vous comprends pas, vous autres humains. Je tue, psychologiquement et physiquement, et je suis incapable de le regretter. Alors que vous... Vous êtes pourtant dotés de cerveaux, non? C'est étrange. Enfin, ça ne sert à rien de partir sur une fausse piste.
- Pourquoi tu fais ça? demanda Gekikara »
Elle ne le regardait pas d'un oeil craintif, comme les autres, elle était curieuse, et gardait étonnamment son sang-froid, de façon remarquable. Dire qu'il n'avait qu'à bouger un doigt pour la tuer. Une seconde, et elle cesserait d'exister. Et pourtant, elle continuait malgré tout à lui parler. Les humains ne cesseraient jamais de le surprendre... Tout était presque parfait, mais cet attachement, ces sentiments en font de Gekikara un être imparfait. Quel gâchis. Il réfléchit ensuite à sa question; pourquoi tuait-il? Il se leva et attrapa Gekira par le bras afin de lui glisser ces quelques mots à l'oreille :
« Je déteste ces traîtres d'impurs, ces gens sans valeurs qui continuent à lutter contre mon pouvoir, ma haine, mes créations. Dire qu'ils auraient pu avoir un bel avenir. Je tuerai leurs amis, je détruirai tous les mouvements qui lutteront pour cette maudite paix, qui auront encore de la volonté. J'instaurerai le désespoir. acheva-t-il, Je les enverrai au fin fond de la brume, ils ne pourront plus jamais s'enfuir... Ils n'ont même pas leur place en Enfer. »
Et sur cela, il se leva. Les enfants sortirent soudainement de l'Académie, en braillant; c'était l'heure de leur sortie. Kuroha jeta un dernier regard à Gekikara, avant de disparaître dans la foule. Certains des enfants lui pointaient la jeune fille du doigt... la reconnaissant. Les parents les prenaient par le bras, l'éloignant d'elle. Les pauvres, ils ne savaient pas encore ce qui allait leur arriver. Elle leva ses deux paumes vers le ciel, les observant; elle y voyait déjà leur sang. Elle ferma les yeux, soupirant, avant de partir à son tour.
